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[art saves life]*

Jeanne Susplugas, pilules exquises

21 Novembre 2013, 16:43pm

Publié par Julie Sem

Jeanne Susplugas, pilules exquises

A l’occasion du prix Opline, le prix d’art contemporain en ligne, qui se termine le 27 novembre 2013, voici le travail d’une artiste en lise, Jeanne Susplugas.

Avec une thématique orientée sur la pharmaceutique et l’addiction en tout genre, JS nous parle de l’ambivalence propre à nos addictions. Comment nos réflexes quotidiens façonnent notre relation envers nous-même et les autres ?

Dans The bath,l’artiste se filme dans un bain de gélules médicamenteuses, le visage serein, elle s’endort, noyée dans ses remèdes qui semblent avoir pris le contrôle de son corps.

JS découvre que le mot « maison » est récurrent chez les personnes souffrant d’addiction. La maison est à la fois un lieu rassurant, protecteur mais il peut aussi devenir le lieu d’un enfermement, niant toute liberté. Nombre de ses travaux, reposent sur cette thématique, tel que son premier projet « la maison malade » où des milliers de boites de médicaments usagées recouvrent un abri du sol au plafond. Le spectateur franchissant le pas de la « maison malade » saisit aussitôt la force du lien que nous pouvons entretenir avec la maladie. Pourtant JS nous parle davantage de nous, de notre comportement envers ce qui nous soulage.

Lighthouse, une structure lumineuse, attirante, face à laquelle nous n’avons qu’une envie, pénétrer à l’intérieur pour en apprécier davantage les effets de lumière.

All the world’s a stage, est une église faite de carton et montée sur roulettes. Ici, JS laisse place à un nouvel ordre d’enfermement, ce symbole religieux semble exprimer dans son ensemble nos réflexes spirituels. JS se plait à y introduire la notion de déplacement, avec les roulettes, qui permettent d’emporter un peu de sa maison partout où nous allons. Idée qui est reprise dans the Pink House, une structure rose, comparable à une niche agrandie sur roulettes.

The Box House est une boite de médicament géante, remède ultime, l’œuvre déconcerte et bouscule nos croyances. Quant à Storage House, une structure en carton, elle est une allusion au foyer d’un patient atteint du syndrome de Diogène, ce besoin impulsif d’amasser des choses, pour chasser le vide à tout prix.

Un constat froid qui n’est pas sans rappeler l’univers stérilisé de la médecine.

D’autres œuvres soulignent une addiction, à laquelle nous sommes tous soumis, la technologie et les nouveaux modes de communication. Avec Boite de déception, la traditionnelle boite hotmail© se mute en répertoire de nos désillusions. Un phénomène tout aussi commun, Erreur fatal, est un message informatique qui nous alarme d’une mauvaise manipulation.

Avec ses Containers, l’artiste réalise une série de dessins, puis des installations, représentant des flacons où le nom des médicaments est remplacé par des mots formant une phrase. Ces phrases, collectionnées par l’artiste au fil des années, sont troublantes et peuvent frôler l’absurde, comme cette phrase de Frédéric Beigbeder« Le soir, tu rentres chez toi, tu lexomiles et ne rêves plus ».

Différentes œuvres, faites de néons lumineux, reprennent les mots de prédilections du travail de JS, « Addicted » (accro), « Workaholic», « Shopaholic » (accro au travail, accro aux magasins) ou encore « Borderline » (à la limite) scintillent sous nos yeux tels des élixirs qui cachent bien leurs effets secondaires. Avec « Fat free » l’artiste pointe du doigt, la manipulation du secteur marchand vantant les mérites de leurs produits à travers des formulations toutes aussi séduisantes les unes que les autres « 0% de matière grasse », « bifidus actif » et même « bon pour le cœur ». Non sans humour, JS nous fait passer la pilule d’une robotisation bien réelle, tel un réflexe « santé » à l’ère d’une société surconsommatrice où l’aspirine devient le champagne du matin.

Son travail est aussi riche de vidéos, pièces sonores, films et textes provenant de sa collaboration avec des écrivains tels que Nicolas Rey, Marie Darrieussecq ou encore Basile Panurgias.

A travers une infinité de médium, JS décortique nos attitudes dans ce qu’elles ont de plus automatique. Notre rapport à un mode de satisfaction immédiate, comme la prise de médicament est symptomatique de nos sociétés. Tour à tour, animée de pulsion de vie et de mort, l’œuvre de JS irradie le proverbe persan « La vie est une ivresse continuelle, le plaisir passe, le mal de tête reste », car si nous calmons nos maux, nos aliénations demeurent. Exorciser la douleur est une de nos préoccupations quotidiennes encore faut-il ne pas emprunter les splendides autoroutes de la désinformation.

Jeanne Susplugas, pilules exquises
Jeanne Susplugas, pilules exquises
Jeanne Susplugas, pilules exquises
Jeanne Susplugas, pilules exquises
Jeanne Susplugas, pilules exquises
Jeanne Susplugas, pilules exquises
Jeanne Susplugas, pilules exquises
Jeanne Susplugas, pilules exquises
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Jeanne Susplugas, pilules exquises
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